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3.1. «Babouchka», cela ne se traduit pas

La langue française n’est pas si riche en emprunts au russe. Les seuls qu’on y trouve désignent des objets qu’un habitant de l’Hexagone ne trouve pas chez lui et qui provoquent son étonnement et sa curiosité: balalaïka, matriochka, et ...babouchka. Car effectivement cette vieille femme russe n’a rien à voir avec la «grand-mère» à la française, et tout Français qui pose pour la première fois le pied en Russie s’en rend compte rapidement.

D’abord la babouchka ne s’offre ni mise en plis chez le coiffeur, ni croisière autour du monde. Elle passe ses journées à courir entre l’école maternelle de ses petits-enfants, le marché ou l’on trouve les légumes les plus frais, et la Sberbank ou elle fait des queues interminables pour toucher sa retraite ou payer ses factures d’électricité. Coiffée d’un incontournable foulard à fleurs hiver comme été, l’air combatif et intransigeant, elle incarne ce qu’il y a de plus sauvage et imprévisible dans le caractère russe.

Elle ne sourit pas si elle n’en a pas envie et n’est aimable que quand elle le juge bon. La babouchka russe n’est pas indulgente avec les autres tant que ceux-ci ne le sont pas avec elle. Passé le seuil de sa demeure, elle est obligée de se battre pour chacun de ses droits: trajets gratuits dans les transports en commun, médicaments moins chers, sa place assise dans le métro... sans parler du droit au respect.

La babouchka russe a une conscience aigue du fait qu’elle ne peut pas se permettre d’être faible. Tant qu’elle a envie de vivre. Elle ne se plaint jamais. Elle lutte. Et son combat est sans pitié. En revanche, si vous avez l’honneur d’être invité chez elle, vous trouverez une hôtesse bienveillante et attentive. Il faudra goûter à son gâteau et vous ne partirez pas avant d’en avoir avalé la moitié. Elle ne manquera pas de vous divertir en vous racontant des anecdotes de sa longue vie. Et lа, soyez-en sûr, son sourire sera aussi chaleureux et sincère que son coeur. N’ayez pas peur des babouchkas.

Le Courrier de Russie. 2008. février