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1.2. Boulot, amphi, dodo

De plus en plus d’étudiants sont contraints de travailler. Au point de mettre en péril la réussite de leurs cursus. Les aides promises par le gouvernement paraissent insuffisantes.

Pour financer leur logement, leurs études, leurs loisirs, etc., la très grande majorité des étudiants travaillent. Selon les chiffres avancés par l’Observatoire de la vie étudiante (OVE), huit étudiants sur dix ont une expérience de l’activité salariée, et plus de la moitié d’entre eux l’ont en dehors des vacances d’été. «Le salariat étudiant a très fortement progressé à la fin des années 1990, puis s’est stabilisé, remarque Louis Gruel, chargé de mission à l’OVE. Le travail des étudiants est bien sûr lié au coût de la vie, mais la contrainte économique n’est pas la seule cause. De plus en plus d’enfants de cadres veulent des ressources propres pour leurs loisirs ou enrichir leur CV, et les activités rémunérées intégrées aux études se développent». L’activité salariée des étudiants recouvre des réalités très diverses. 29 % des étudiants ne travaillent que l’été, mais la part de ceux qui travaillent tout au long de l’année augmente avec l’âge. Une évolution toutefois limitée par «l’exigence d’assiduité, un volume horaire important, la charge de travail personnel [qui] sont autant de facteurs dissuasifs souvent présents dans certaines filières sélectives et professionnelles de l’enseignement supérieur», soulignaient en 2004 Catherine Béduwé et Jean-François Giret dans une enquête réalisée pour le Centre d’études et de recherches sur l’emploi et les qualifications (Cereq), intitulée «Le travail en cours d’études a-t-il une valeur professionnelle?» Parmi les facteurs incitants ou contraignants le jeune à avoir une activité rémunérée, on trouve également le montant des ressources financières, les possibilités d’emploi dans sa commune de résidence et d’autres facteurs plus difficilement quantifiables, comme «le désir d’autonomie ou la motivation pour les études», précise l’enquête.

Améliorer la situation de ces étudiants, c’était l’objectif affiché par le ministre du travail, Xavier Bertrand, en annonçant, au printemps dernier, l’exonération d’impôt sur le revenu des salaires des étudiants. La mesure, concrétisée par la loi travail, emploi, pouvoir d’achat (loi TEPA) du 22 août, se limite toutefois à élargir le champ des bénéficiaires de cette exonération jusque-là limitée aux jobs d’été des moins de 21 ans. Elle s’étendra désormais à tous les salaires perçus par les jeunes âgés de moins de 25 ans, qu’ils soient ou non rattachés au foyer fiscal de leurs parents, dans la limite d’une rémunération équivalente à trois mois de smic (au lieu de deux auparavant), soit 3 750 euros.

La mesure est pourtant loin de répondre aux attentes de la plupart des syndicats étudiants. «Cette annonce est arrivée avant des discussions sur les conditions de vie; nous attendions des réponses sur les montants des bourses, une allocation de rentrée des étudiants», déplore Claire Guichet, vice-présidente en charge des œuvres universitaires à la Fédération des associations générales étudiantes (FAGE), organisation qui se veut apolitique. Si elle va dans le bon sens, la mesure ne changerait rien, estime le syndicat. Un avis partagé par l’Union nationale des étudiants de France (UNEF), proche de l’opposition. «La quasi-totalité des étudiants salariés ne le sont pas suffisamment pour être imposables. C’est une annonce qui sonne très bien, mais qui, en réalité, ne va toucher que très peu d’étudiants. C’est une fausse réponse à un vrai problème», estime Camille Miclot, membre du conseil national de l’UNEF. «Nous déplorons que ce soit de l’argent utilisé sans concertation, renchérit Claire Guichet. Bien sûr, c’est une avancée pour les quelques familles qui paieront moins d’impôts, mais elles sont peu nombreuses. Surtout, nous souhaitons un système qui aide les étudiants, et non plus les familles».

Le Monde Campus. 2007. № 19